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SwingJO Jo Privat, l'accordéon swing et la valse musette
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jc-erard Membre actif

Inscrit le: 17 Jan 2005 Messages: 3163 Localisation: GENEVE
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Posté le: Lun Nov 05, 2007 9:26 am Sujet du message: Message de Jimmy Giordanengo, accordéoniste.... |
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Salut les Pralos,
je reçois ce texte et au vu de ce qu'il contient, je vous fais partager ces émotions.....
Citation: | Expéditeur : "Jimmy" <j.fisaccord@wanadoo.fr>
Destinataire : "jc-erard" <jc-erard@laposte.net>
Date : 05/11/07 09:12
Objet : Envoi d'un message : BAR VERNANTE
voilà mon ami le début de ma biographie.En fait ce sont surtout les souvenirs d'une enfance tourmentée par la pauvreté et la guerre mais riche malgré tout d'évènements de toutes sortes et toujours cette magie de la musique et de l'accordéon. Je vais finir mes 78 ans le 14 février 2008 c'est dire que j'en aurai à raconter sur ma vie professionnelle de musicien mais je ne sais si cela en vaut la peine ......peut être pour mes petits enfants quand ils seront adultes.
Mes amitiés Jimmy Giordanengo
Bar Vernante , c'était au début des années 30 et la voisine d'en face Mme Stagnetto avait dit à sa mère « Pauvre Madame vous vous êtes fourrée dans un beau pétrin ! vous avez acheté un commerce qui ne vend pas trois ballons de vin par jour , avec 4 petits sur les bras vous allez crever de faim. « Mais il était trop tard pour se lamenter et sa mère n'était pas femme à se laisser impressionner par ce genre de commentaire. Elle se mit donc au travail .Il ne fallut pas longtemps pour que ce vieux bistrot de la rue Bonaparte devienne le rendez vous de tous les piémontais qui venaient à Nice de leurs villages, pour travailler au charbon pendant l'hiver. Ils étaient tous originaires des premiers villages au delà de la frontière , passé le col de Tende Limone ,Vernante , Robilante , Roccavione , Borgo S Dalmazzo . Ils habitaient le plus souvent dans des hameaux faits d'un aggloméré de trois ou quatre habitations perchés à flanc de montagne et que l'on appelle encore des teït , teït soutant teit chêut teït chastelas etc ...Mais aucun de venait d'une ville comme Cuneo , ce n'était pas des citadins mais de solides paysans montagnards qui vivaient dans des maisons primaires avec l'eau à la fontaine et le chauffage dans la cheminée de la salle qui servait de séjour, de salle à manger et de lieu de rencontre le soir à la veillée . Dans ces années là, la vie était dure , peu de terre à cultiver , un climat rude et souvent une famille nombreuse à nourrir , ceux qui possédaient une vache étaient considérés comme des nantis . Les lits étaient garni de matelas remplis de paille d'épis de maïs l'été et de plumes d'oies l'hiver , il ne fallait pas rater la place au milieu du lit si l'on ne voulait pas passer la nuit contre les bois du montant.; Les draps quand il y en avait était en toile de bure et se transmettaient de mère en fille . La langue parlée était le piémontais, bien rares étaient ceux qui parlaient l'italien , Cavour n'ayant fait l'unité qu'en1860 .
L' hiver rigoureux faisait fuir les jeunes vers les villes de la côte d'azur où ils venaient gagner leur vie d'hommes en livrant le charbon dans les immeubles alors que les filles s'employaient comme bonnes à tout faire, les plus dégourdies travaillaient comme femme de chambres dans les grands Palaces de Nice et Cannes . Combien d'entre eux à leur arrivée à Nice venaient prendre pension au bar Vernante chez Ninà di Nials qu'ils finissaient par considerer comme une deuxième maman . Ils portaient tous des surnoms comme Giaccou e'd mezza via , Giaccou boulangié , Pierrin e'd Palanfrè ou Natin d'la roussa. Ils arrrivaient souvent à pied traversant la frontière avec le « magaou a tre banna » (pioche à trois dents) sur l'épaule et « lou daï » la faux pliée en deux à la ceinture.Ils venaient faire la première coupe (sega la pastura) dans la plaine du Var parce que en ce temps là entre St Augustin, faubourg immédiat de Nice et Castagniers distant de 15 km il y avait 45 laitiers donc beaucoup de troupeaux de vaches à nourrir.
.Après la première coupe dans la vallée ils allaient plus haut dans la montagne puis redescendaient dans la plaine pour une 2° et 3° coupe. La ville était approvisionnée en lait par toutes ces petites exploitations disparues après la guerre et que les vieux niçois se rappellent avec nostalgie . Le lait avait alors le goût du lait vrai que nos enfants d'aujourd'hui ne connaîtrons jamais .
Le dimanche était pour tous ces montagnards le jour des retrouvailles qui les amenaient dans des bars dancing tenus par leurs compatriotes où ils se retrouvaient pour parler de leurs affaires, de leur travail et se transmettre les nouvelles du pays.
Ce quartier du port à Nice était un conglomérat d'établissements qui se ressemblaient tous , un bar avec un comptoir et quelques tables et dans l'arrière salle on dansait au son de l'accordéon. L'orchestre était composé le plus souvent d'un accordéoniste et d'un batteur et si les affaires étaient prospères le patron ajoutait un musicien qui jouait de la mandoline ou du banjo. Les danses les plus demandées étaient « la courrenta e ballet » qui se dansaient en duo les partenaires face à face se tenant par les mains faisaient des petits pas sautillants puis tournoyaient en se tenant par la taille sur le côté la tête tournée vers celle du partenaire en une sorte de défi amoureux. Danse folklorique villageoise qui aujourd'hui encore se pratique dans les villages du piémont. Mais le lambetwalk et le charleston ne manquaient pas au répertoire.
De la place Garibaldi à la place Saluzzo il y avait 3 bals ,chez Manara, Giordanengo, Galliano dont la fille une superbe blonde jouait du piano et chantait divinement, Dans les rues transversales chez Marguerite rue Martin Seytour, Le café express rue Auguste Gall et chez Lanteri rue Bavastro derriere l'église du port. Tous faisaient le plein le dimanche du début de l'après midi jusqu'à minuit qui était l'heure limite autorisée par la police . Pendant que les jeunes dansaient les hommes plus mûrs se retrouvaient autour des tables du bar et chantaient à tue tête, en tierces les chansons populaires comme « Il mazzolin dei fiori » « l merlo a perso l'occhio ...la lingua ...il becco » qui n'est autre que la version italienne d'Alouette gentille alouette. Les chansons des Alpins avaient un succès fou et aujourd'hui encore bien des habitants des alpes maritimes les considèrent comme faisant partie de leur patrimoine.
Les bouteilles de « barbera « un vin d'Asti rouge sucré et pétillant leur donnait de la voix et sitôt la bouteille vide quelqu'un ordonnait : padroun n'auta bouta't coul'boun. (Patron une autre bouteille et du bon !! Le patron fabriquait lui même ce vin qu'il avait appelé « BARBERATO » Vin mousseux naturel mais qui en fait n'était qu'un petit vin sucré qui moussait grâce à une petite pastille qu'il mettait dans chaque bouteille . Inoffensif gouleyant et pas cher ! c'était les principaux ingrédients du succès. Le dimanche soir dans son lit le petit Victor entendait chanter tous ces hommes , longtemps il restait les yeux ouverts écoutant les chansons qui passaient au travers du plancher et ce n'était que terrassé par le sommeil qu'il fermait les yeux avec regret .
Il n'avait pas encore quatre ans quand son père lui offrit pour le Noël 1933 un petit accordéon diatonique pour essayer de le dissuader d'aller déranger l'accordéoniste un certain Bastian surnommé « Bastian sensa braille » Ce surnom lui venait certainement d'une enfance misérable qui l'avait contraint faute de moyens d'aller sans pantalon et le surnom lui resta jusqu'à sa mort . Il jouait de l'accordéon « de routine » sans avoir jamais appris mais c'était alors bien suffisant pour faire danser ses compatriotes pendant le bal du dimanche après midi .La salle du bal se trouvait dans un bâtiment situé derrière le bar et pour y accéder il fallait traverser une sorte de cour recouverte d'un toit fait de planches zinguées sur lequel quelques poules nichaient dans un poulailler de fortune .Tout était bon pour améliorer l'ordinaire ,quelques ½ufs frais gobés le matin pour donner des forces aux enfants et quand une poule ne pondait plus c'était le bouillon de poule assuré ! Quelques jours plus tard le petit Victor jouait de l'accordéon à la surprise générale, de routine comme Bastian qui lui n'en revenait pas . Son premier morceau fut « Miètte » de l'opérette marseillaise « Le pays du soleil de Vincent Scotto Grand succès de l'époque puis ' le plancher des vaches ' et ' Quand on s'aime bien tout les deux ' Les fraises et les framboises ' la chanson que lui chantait sa mère , si douce et toute en rondeurs. Pendant longtemps il eut le bonheur de se blottir sur cette poitrine abondante jusqu'au jour où il réalisa à regret qu'il n'était plus un petit enfant.
Voilà comment débuta cette aventure , une vie qui serait jusqu'au bout conditionnée par ce cadeau de Noël . Le petit Victor ne le savait pas à ce moment là , l'accordéon n'était qu'un jouet et il était le premier étonné de l'intérêt que l'on manifestait à son égard. Quand l'envie le prenait il s'asseyait sur la marche à l'entrée du bar et commençait à jouer mais quelques minutes suffisaient pour que la rue Bonaparte devienne soudain impraticable, des dizaines de badauds se bousculant pour voir le phénomène , mais quand l'envie était passée il pliait son accordéon et rentrait dans le bar suivi par la foule qui en réclamait ; Victor n'avait pas le sens du commerce et... quand c'est fini c'est fini !! Seul l'épicier d'en face Monsieur Boutaù pouvait à la rigueur le faire changer d'avis avec la promesse d'un Kaki ou d'une banane. « mi jeuguès un mouceù, ti douni un kaki » lui disait il en niçois « tu me joues un morceau je te donne un kaki « Quelques fois çà marchait mais l'aubade était alors aussi brève qu'un télégramme . Un an plus tard son père fit fabriquer spécialement pour lui un accordéon chromatique et il lui en expliqua le fonctionnement en lui disant « tu vois avec le diatonique en jouant une note tirée cela fait un son , la même poussée en fait un autre , avec le chromatique c'est le même son tiré ou poussé ....c'est encore plus facile » Ce fut là tout ce que son père pouvait lui enseigner mais il ne fallut pas longtemps à notre jeune garçon pour comprendre le changement de système .
Victor était le benjamin de la famille , avant lui il y avait Lisette la cadette, Fifine la puînée et Jeannine la grande. Quatre en cinq ans ce n'était pas une sinécure et pas d'allocations familiales pour aider les familles nombreuses mais le travail ne manquait pas et le courage non plus . Il fallait bien payer le fond de commerce acheté à crédit bien sûr . Deux années passèrent puis ce fut la rentrée à la communale , l'école Barla , le premier jour son père l'accompagnât pour le présenter au Maître M. Lacour mais après Victor se rendit à l'école tout seul , il arrivait quelques fois en retard , la faute à la petite boutique en face l'école qui avait en vitrine une boite de caramels mous dont l'emballage était aux couleurs du drapeau belge et pour deux sous on tentait sa chance, si dans l'emballage c'était écrit « gagné » on reprenait un autre caramel et le tirage continuait. Victor avait une chance insolente !!
L'école Barla avait une particularité , les instituteurs avaient des noms qui prêtaient à rire: M .Lacour qui avait en charge le CP déjà surchargé à l'époque puis Mrs Clapier et Lerond , M. MERLE le directeur qui sera fusillé par les allemands pour faits de résistance et dont l'école porte aujourd'hui le nom .
Les enfants eurent vite fait d'inventer une comptine se servant du nom des instits ( dans Lacour un Merle fait Lerond autour du Clapier ) etc... ce n'était pas très futé mais cela suffisait pour faire les délices de la marmaille. C'était pour eux l'apprentissage de l' humour.
M . Bonifassi était un petit homme avec une moustache grise comme un paquet de tabac et dont le nom ne permettait pas l'entrée dans la comptine .Il était célèbre dans la mémoire des écoliers pour sa façon de les menacer du Grand Huit, une règle d'une dimension peu commune , terrible qu'il tenait enfermée dans un placard dont seul il possédait la clé et quand il annonçait
« je vais chercher le grand huit , un air de panique soufflait sur les élèves il n'en fit d'ailleurs jamais usage.
Il faisait la classe vêtu d'une blouse grise et son feutre ne quittait jamais sa tête quelle que soit la saison.
On dit que les premières dix années de la vie conditionne le reste de l'existence et Victor n'oublia jamais cette période pas toujours bien gaie mais faite d'une insouciance et d'une joie de vivre qu'il ne retrouverait plus jamais. Elle devait se terminer par la communion solennelle en l'église ND du port, à ce moment là il fallait passer l'examen du cathé pour être admis au Saint sacrement. Aujourd'hui encore , plus de 60 ans après il se souvient de la question qui lui fût posée « sais tu ce que c'est la Ste Trinité ? » Victor ne le savait pas une minute auparavant mais soudain ce fut l'illumination et il répondit plein d'assurance « c'est le Père ,le Fils et le St Esprit. » Heureux ! il fit sa communion mais hélas la guerre de 39/40 venait d'être déclarée et déjà les restrictions commençaient .Le repas de communion fut plutot frugal et tristounet.
Ainsi commença la période la plus triste de la vie de Victor . Son père le brave Dounatin refusa une augmentation de loyer pour les locaux commerciaux qu'il occupait sous prétexte que c'était la guerre et qu'il était mobilisé, son entêtement conduisit la famille à la ruine. L'expulsion fut prononcée par le tribunal de commerce et tout le monde se retrouva à la rue . Dix ans d'efforts et de travail anéantis par un coup de tête . Pour lui qui devait mourir d'un accident en 1943 le calvaire ne dura que 3 ans mais pour la pauvre Nina sa femme veuve à 40 ans avec 4 enfants cela dura beaucoup plus longtemps. Tout le temps de l'occupation ils connurent la famine et le désespoir . Ils habitaient alors un appartement vétuste dans la quartier de la Place d'armes où avant la guerre les jeunes soldats du 22° régiment d'infanterie de la caserne des « diables bleus » venaient man½uvrer et sur l'emplacement de laquelle on construisit un stade avec une piste cendrée sur laquelle Jules Ladoumègue venait s'entrainer .Ce Ladoumègue champion olympique du 1500 m qui connut la honte pour avoir accepté un quelconque backhisch d'une firme qui se servit de son nom pour une publicité , chose interdite à l 'époque mais qui prête à sourire aujourd'hui quand on sait ce que le sport recèle comme argent . Les temps changent !
La disette était si grande et les moyens si petits que l'on compensait le manque de nourriture par un excès de spiritualité . Les enfants toujours en quête de quelque chose à grignoter allaient au portail des riches villas du quartier de Cimiez occupées par les soldats Italiens et à l'heure de la soupe ,une boite en fer blanc à la main attendaient patiemment que la troupe ait diné .Alors c'était l'ordre tant attendu « sù raggazi fatevi avanti ! » et chacun se précipitait vers la cantine où un brave soldat remplissait les récipients de fortune de tous ces petits affamés que nous étions. Aujourd'hui encore , nous nous souvenons avec une certaine tendresse de ces faux occupants qui , nombreux avaient de la famille parmi ces émigrés piémontais et italiens qui constituaient une grande partie de la population Niçoise , situation Cornélienne qui menaçait de collaboration bien des braves gens qui n'en pouvait mais . Il semblait alors que jamais ne s'éteindrait ce tiraillement que nous ressentions au fond de l'estomac et quand on ne savait plus que faire , on trouvait alors refuge au patronage Don Bosco où l'abbé Hector un solide Lorrain avec l'accent de son pays nous prodiguait la bonne parole certes mais surtout un bout de pain et confiture qui nous rapprochait de Dieu plus que toutes les prières. Epoque effroyable , la ville occupée par les Italiens fut bombardée et les enfants prirent conscience de la mort . C'est au retour d'une colonie de vacances que Victor apprit la mort de son père par un camarade qui lui demanda bêtement « c'est vrai que ton père est mort ? » Ce jour là l'abbé les réunit et dit « nous allons faire une prière pour celui d'entre nous qui mourra le premier » Ce jour là Victor devint adulte.
Dounatin son père était mort en Allemagne où il était parti travailler croyant innocemment à la propagande de Vichy qui disait qu'un travailleur volontaire permettait à un prisonnier de guerre français le retour à la maison . Il était d'autre part sans travail et sans ressources pour élever ses 4 enfants et il crut bien faire .Jamais il n'eut de raisons politiques mais ce fut un mauvais choix qu'il paya de sa vie . Longtemps Victor traîna une espèce de honte car ce n'était pas bien vu d'être volontaire pour partir travailler dans un pays ennemi sans compter les risques de bombardements.
C'était un bon élève et il fut bientôt admis en 6° au Lycée Masséna . Grâce à une bourse il put commencer ces études secondaires. Latin ,Allemand ,Anglais programme chargé pour un enfant qui n'avait personne pour le soutenir dans ses études et de surcroît quand il fut en 4° la classe partit se réfugier à Pont de Beauvoisin un village qui a la particularité d'être à cheval sur deux départements , l'Isère et la Savoie. Le bourg séparé par une rivière Le Guier a deux églises et deux mairies et les Savoyards faisaient preuve de quelque condescendance envers les Iserans , Nul ne sait ce qui justifiait ce sentiment de supériorité, mais c'était ainsi. La région avait une apparence tranquille mais chacun savait que bien des maquisards se cachaient dans les montagnes voisines, les maquis de l'Ain et du Vercors faisaient parler d'eux . Quelques fois on voyait débouler dans le village une Citroën traction avant avec les lettres FFI écrites en blanc sur les portières et couchés sur ses ailes avant deux jeunes maquisards armés de mitraillettes , c'était une sorte de provocation pour rappeler à la population que l'heure de la libération approchait . Les petits réfugiés niçois avaient été accueillis dans des familles de notable du pays , Notaire , commerçant, pharmacien etc ....tous ne partageaient pas les mêmes options politiques et pour sa part Victor à l'heure du déjeuner écoutait les infos et l'éditorial de Philippe Henriot journaliste collaborateur qui faisait l'apologie du gouvernement de Vichy et qui fut abattu chez lui en plein Paris par deux maquisard qui sonnèrent à sa porte et s'enfuirent sans être inquiétés. Jusqu' à ce moment la guerre signifiait pour nous, faim et privations de toutes sortes mais nous réalisâmes soudain qu'il y avait une autre face dans ces évènements . L'exécution en place publique d'un voleur qui avait mis son forfait sur le dos du maquis nous fit comprendre que l'affaire était sérieuse . Le pharmacien était un chef de la résistance et quand un soldat allemand pointait le bout de son nez il disparaissait prudemment ne réapparaissant que lorsque la voie était libre.
C'est pendant cette année 44 avant la libération que parmi ces enfants réfugiés se nouèrent des liens d'amitiés qui devaient durer toute la vie.
Victor qui avait alors 14 ans avait amené avec lui son accordéon et il eut la surprise de retrouver un copain de Lycée Paul Martino qui lui aussi jouait de l'accordéon . Ils devinrent très amis mais la libération et le retour à Nice les sépara pour longtemps. Ils se retrouvèrent par hazard 58 ans après et si Victor avait fait sa vie de musicien Paul était devenu Psychiatre. La vie qui les avait séparés les fit se retrouver tels qu'ils étaient alors avec la même fraîcheur d'esprit et la même philosophie de la vie , le coeur toujours à gauche et toujours cette pointe de rage, d'anarchisme et de révolte contre toutes les injustices de la vie.
Toutes les guerres ont une fin et celle ci se termina par la rédition sans condition de l'Allemagne d'Hitler qui se suicida dans son bunker de Berlin avec son ministre de la propagande Goebel qui sacrifiat sa femme et tous ses enfants. Ce fut alors dans toute la France une explosion de joie et de sentiments de toutes sortes, besoin de rattrapper le temps perdu . Victor arrêta ses études .
L'ADOLESCENCE
Il avait 15 ans et désormais il était l'homme de la famille, famille quasiment misérable , la mère jeune veuve de 43 ans et qui devait faire face seule aux énormes responsabilités que lui imposaient sa progénitures. L'ainée des 3 filles avait 17 ans et les autres se suivaient à 18 mois d'intervalle. La crainte alors était de voir les filles se perdres , les tentations étaient alors à portée de toutes ces adolescentes ,les soldats américains qui étaient en permission sur la côte d'azur affichaient les dollars en guise de pochette à leur uniforme de marines et cette manne semblait inépuisable. Après une longue période de famine, d'abstinences de toutes sortes , le besoin de revanche sur l'adversité il fallut bien du cran et une éducation spartiate pour ne pas succomber. La pauvre Nina ne se remaria jamais et n'eut jamais d'autre compagnon et d'ailleurs quel homme eut été assez téméraire pour prendre en charge une veuve et ses 4 orphelins.
La pauvre Nina ne se remaria jamais et n'eut jamais d'autre compagnon et d'ailleurs quel homme eut été assez téméraire pour prendre en charge une veuve et ses 4 orphelins.
Pour Victor le problème était la musique, rien ne put le détourner du but qu'il s'était inconsciemment fixé , doué et par conséquent paresseux il n'avait personne dans sa famille pour le guider et lui faire entreprendre des études musicales sérieuses, c'est donc par esprit autodidacte qu'il se perfectionna d'abord à l'accordéon puis au bandonéon.
Il commença à jouer de l'accordéon dans un bar route de Turin chez Belonne petit bar fréquenté par des soldats américains et ou il découvrit les hits de l'époque, le jazz qui lui était inconnu, le swing dont il pensait que c'était une danse comme le tango ou la valse mais qui en réalité était le balancement produit par l'accentuation des temps faibles . Il faisait ses classes autour de la « giostra » le manège qui tournait place Garibaldi et dont le propriétaire était un mordu d'accordéon. Il passait à longueur de journée les disques de Gus viseur ,Tony Murena et Jo Privat et régalait la bande de jeunes apprentis que nous étions .Quel délice, nous écoutions avec ferveur la flambée montalbanaise, douce joie, mystérieuse et autres nuits blanches et nous pensions que jamais nous ne jouerions aussi bien. Aujourd'hui encore ces valses ne sont pas démodées et font la joie des bons accordéonistes. |
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